Etre serveuse au Paradise, c’est un travail à plein temps. Il y a toujours des clients, et ils ne sont parfois pas commodes. Je suis exténuée. Et pourtant, je commence le travail dans…. QUOI ? Cinq minutes ?! OH MY GOD ! Sortir du lit, mettre une tenue convenable, passer un coup de maquillage pour pas paraitre fatiguée, un petit coup de brosse à dents, et me voilà sortie de ma suite en courant direction le travail. Une minute de retard. Mais bon, je suis là, c’est le principal. Les clients ne sont pas trop présents à cette heure ci de la journée, il faut dire qu’il est encore tôt pour un cocktail, mais il faut toujours être présent au cas où. Ordre du chef, on ne conteste pas.

Bref, cela faisait une bonne heure que je poireautais, heureusement, j’avais mon jeu de mots fléchés pour ne pas m’ennuyer aux heures creuses. D’ailleurs, si j’attrape celui qui m’a fait une grille, il va passer un sale quart d’heure. Anyway, une cliente arrive, enfin ! Son visage me semble familier, pourtant, je suis sure de ne jamais l’avoir rencontrée auparavant. Sa silhouette fine, ses traits du visage, tout me semblait familier. Eliana Montgomery ! Mais oui, bien sur !!! Cette jeune patineuse tellement talentueuse qui s’était blessée en pleine compétition. Je m’étais toujours demandée ce qu’elle était devenue après ça, et voilà que je la rencontrais. Mon regard ne pouvait la quitter. Il fallait que j’aille lui parler ! Oui, mais pour dire quoi ? Elle n’aimerait pas forcément que je lui parle de son passé, elle a du tellement souffrir de devoir arrêter la compétition… Bon tant pis, je me lance, au pire, elle me rembarre, mais au moins, j’aurai essayé.

« Bonjour ! Vous êtes bien Eliana Montgomery ? Je voulais juste vous dire à quel point j’ai aimé votre patinage, il reflétait tout le bonheur que vous viviez. Je vous admire, et d’ailleurs, je pourrai avoir un autographe s’il vous plait ? »

Pendant que je parlais, mon visage avait viré au rouge, tandis que je remarquai qu’elle ne savait pas trop quoi dire. J’avais peut être touché le point sensible…

Charlie & Eliana ✎ "On ne fuit pas son passé. Quoi que l'on dise, quoi que l'on fasse, il nous rattrape toujours. Tu pourras tenter de lui échapper. Tu pourras te cacher dans un endroit désert ou éloigné de tout ce qui pourrait te le rappeler. Mais il sera toujours là, tapis dans l'ombre, derrière toi, prêt à bondir et à te prouver que tu ne peux pas lui échapper. Alors pourquoi te fatiguer?" © Miss_Cassie Skinny.lOve

Embarquer sur un paquebot pour une croisière d'un an. Une idée complètement folle. A quoi bon? Prendre l'air, voyager, profiter du luxe. Et oublier. Il fallait que je fasse un break dans ma vie et ce fut pour cette raison que je pris cette décision qui pouvait paraître insensée aux yeux des autres, de ceux qui n'osaient pas se lancer dans l'aventure. Nous avions pris la mer depuis peu de temps. Je n'avais pas encore eu le temps de visiter tout le bateau. On ne s'imagine pas comme ça, quelle taille peut avoir ce moyen de transport maritime. C'était dingue. Quoi qu'il en était, je faisais le tour de ce cher bateau qui était devenu mon habitation pour une unique année quand je tombai sur le bar. Hum... Je ne buvais pas vraiment, à part quelques fois à des soirées mais jamais de trop non plus. Je n'avais pas bu même après ma chute qui fut le début de ma descente en enfer. Je finis par entrer car il n'y avait personne. J'entrai et admirai le décor. Quelques serveuses étaient là, sans doute pour être sûr qu'elles soient assez lorsque l'heure de pointe arriverait. Je m'installai à une table.

Une jeune femme vint alors me rejoindre, visiblement l'une des serveuses. Une jolie brune, plutôt grande et fine. Je pensais qu'elle venait simplement prendre ma commande. L'avantage quand on va sur un bateau comme celui-ci, c'était que peu de gens vous reconnaissaient. Et cela, qui pouvait apparaître comme un détail pour vous, était très important pour moi. C'était un assez bon moyen pour moi de mettre de côté mon ancienne carrière de patineuse artistique. Sauf que j'allais bien vite déchanter. Je souriais, prête à commander un cocktail sans alcool quand elle m'aborda en me saluant. Jusque là, rien de bien anormal me direz vous. Elle me demanda si j'étais bien Eliana Montgomery et là, ce fut le drame. Elle enchaîna sans vraiment me laisser le temps de répondre en me disant qu'elle voulait juste me dire qu'elle avait adoré mon patinage, que ça reflétait bien le bonheur que je vivais et qu'elle m'admirait. Puis elle me demanda un autographe. Un an. Un an que j'avais été loin de tout ça. J'avais vécu recluse pendant des semaines après mon accident. Je n'avais plus chaussé un seul patin et voila qu'une parfaite inconnu venait me demander un autographe... Le sourire qui ornait mon visage avait disparu et je ne savais pas comment réagir. Devais-je me comporter comme une méchante qui à l'époque faisait la fille naturelle et adorable devant les caméras pour donner le change et une bonne impression d'elle ou devais-je lui signer son autographe sans ronchonner?

-Je... J'ai quitté ce monde maintenant...

Ce n'était pas vraiment pour la rembarrer. Ce n'était pas non plus parce que je n'en avais pas envie, au contraire. Mais ce simple geste de signer un autographe, les paroles de la jeune femme sur mon patinage qui étaient si gentilles, tout ça faisait remonter en moi de mauvais souvenirs. De très mauvais souvenirs. Mais au fond, ne pouvais-je pas faire l'effort de lui en signer un, si en échange elle ne me parlait plus de ça? Je verrais bien en fonction de sa réponse. Peut-être que je le lui signerais, au final...

Depuis que j’étais sur ce bateau, j’avais remarqué que beaucoup de passagers voulaient oublier. Oublier leur vie, oublier leurs problèmes, oublier ce qu’ils étaient sur la terre ferme. Et je me rendais compte qu’hormis la question de l’argent, nous étions pareils. Notre seul but, oublier et cacher notre passé. Je le savais bien je cachais moi-même qui j’étais. Je ne voulais pas qu’on me voit seulement comme la fille du célèbre avocat Robert White, qui avait déchanté, fait faillite, et presque abandonné sa famille pour avoir de l’argent. Je l’aimais, mais à ses yeux comme à ceux de ma mère, j’étais invisible, je n’existais plus, je n’étais plus leur petite « Charlie chérie », comme ils avaient l’habitude de m’appeler avant. Bref, je ne me rendis bien trop tard avec Eliana que j’avais évoqué ce qu’elle voulait cacher, oublier. Je n’aurais pas du aborder ce sujet, et je ne le comprenais que maintenant. J’avais visiblement fait remonter ses souvenirs qui la hantaient, et j’avais juste envie de creuser ma tombe, ici même, tellement cela m’avait gênée. J’étais trop curieuse, trop indiscrète, et ce n’est pas toujours une bonne chose. Bon, comment arranger les choses ? Enfin, arranger, grand mot hein. Euh… Oh pourquoi pas ne plus évoquer le terme de patinage, et me présenter ? Ouais, c’est peut être bien ouais. Essayons, on n’y perd rien.

« Je suis désolée si je vous ai gênée à propos de … Enfin bref, moi c’est Charlie, Charlie White. Vous voulez boire quelque chose ? »

En me présentant, je lui tendis ma main, histoire d’être un minimum polie. Et puis, j’ai repris mon job, bon moyen la plupart du temps pour un premier contact. Son expression du visage avait changé, elle paraissait un peu plus à l’aise, quoi que… Moi j’étais toujours rouge comme une tomate, je n’aurai pas aimé me regarder dans un miroir à ce moment là.

Charlie & Eliana ✎ "On ne fuit pas son passé. Quoi que l'on dise, quoi que l'on fasse, il nous rattrape toujours. Tu pourras tenter de lui échapper. Tu pourras te cacher dans un endroit désert ou éloigné de tout ce qui pourrait te le rappeler. Mais il sera toujours là, tapis dans l'ombre, derrière toi, prêt à bondir et à te prouver que tu ne peux pas lui échapper. Alors pourquoi te fatiguer?" © Miss_Cassie Skinny.lOve

La jeune brune n'avait rien fait de mal. Au contraire. Elle avait été enthousiaste, sympathique, chaleureuse. Elle avait simplement fait l'erreur de me parler de patinage, l'une des choses qu'il me manquait le plus au monde. Mais elle ne pouvait pas savoir. Elle devait bien se douter que je devais avoir eu du mal suite à mon accident mais elle n'était pas forcée de deviner que forcément, je refusais même d'en parler. Ce n'était donc pas une faute mais une erreur. Oui, j'avais vu ça en philosophie, quand j'allais encore en cours. C'était durant la dernière année pendant laquelle j'avais été scolarisée d'ailleurs. Je la vis rougir comme une tomate et je me sentais à présent coupable de l'avoir envoyé promener. Elle se présenta et m'informa donc qu'elle s'appelait Charlie White avant de me demander si je voulais boire quelque chose. Elle me tendait la main donc je la serrai poliment avant de répondre:

-Hum... Oui, je veux bien un cocktail sans alcool s'il vous plait.

Je ne me présentai pas en retour car j'aurais eu l'air drôlement quiche que vu que je savais pertinemment qu'elle me connaissait, m'avait reconnue. Je souris doucement, la laissant aller vaquer à son occupation. Comment me rattraper de l'avoir mise mal à l'aise? Ce n'était pas dans mon habitude d'être très sociable, d'aller vers les autres mais je me sentais tout de même un peu mal de l'avoir mise dans cet état et donc je voulais me rattraper. J'attendis qu'elle revienne avec ma commande pour simplement lui demander, avec un sourire franc bien qu'un peu petit malgré tout:

-Vous avez du temps pour vous asseoir et discuter un peu?

Quel meilleur moyen pour se rattraper que de finalement lui donner une nouvelle "chance", si je pouvais dire ça de cette façon là? Et puis, je n'avais rien de mieux à faire non plus alors autant commencer par faire enfin la connaissance de quelqu'un non? Je lui signerai également un autographe mais ce geste là viendrait tout de même encore un peu plus tard.